J'ai filé en douce comme on dit. Je n'ai pas encore établie si c'était par honte ou par sécurité, mais ça viendra. Ce Deux est vraiment confiant, un peu trop même. Il a bien beau être bâti comme un bœuf ou courir comme un cheval rien n’est impossible contre lui. On a tous une faille à quelques parts, si ce n’est pas physique c’est psychologique. Je n’ai pas trouvé la sienne encore, mais ça viendra ça aussi. En tout cas, c’est pas lui qui me fait peur, c’est vraiment ce Un. Lui, d’après ce que j’ai vu à l’entrainement, il ne ressent rien de rien. Il est… comment dit-on? Psychorigide? Je ne m’en souvient plus, mais ce genre de personne sont folles alliées; faut pas trop leur toucher. Bref, demain je vais faire attention à mes fesses.

J’ai retrouvé mon arbre facilement malgré la noirceur. Par contre l’ascension ne fut pas de tout repos. Je me suis écorché les genoux, les coudes, les joues…. Un peu partout quoi! Un fois arrivé à ma branche, je me mis vraiment à relaxer. Personne ne peut m’atteindre ici, je suis assez haut. J’entends tout de même Oz et l’autre gars du cinq. Ces deux-là sont tellement ignorants, je suis convaincu qu’à la corne on les entend comme si ils étaient à côté. Non mais!

Je retrouve mon sac. Marcher sans lui m’a fait du bien. Bien qu’il soit plein de bonnes choses il reste quand même lourd. J’en ai mal au dos. Je prends mon sac de couchage et je m’y glisse sans attendre. Il est douillet, quasiment plus douillet que mon lit chez moi, mais pas autant qu’au Capitole! Je m’attache au tronc avec ma corde, je n’ai pas envie mourir parce que j’ai tombé d’un arbre, mais quelle honte!

Avant de dormir, je me perds dans mes pensées. Je repense à ma journée. Il y a quelques heures, j’étais au Capitole. Maintenant, je survie. Comme à mon habitude, j’essaie de trouver trois choses bien dans ma journée. Aujourd’hui ce n’est pas facile. Être toujours en vie ça compte? On va dire que oui sinon je finirai jamais. Donc, plus que deux. C’est difficile, mais je dois réussir, j’y tiens. Je suis toujours capable d’en trouver. Aller, faut que je me concentre, seulement deux petits trucs biens. Ce n’est pas compliqué pourtant! Vite! J’ai l’impression que ma survie en dépend. Si je ne suis pas capable de faire ça, qu’adviendra-t-il de ma santé mental? Je n’en sais trop rien. Normalement, il y a toujours des trucs biens qui arrivent à tout le monde dans une journée. Soudain, c’est comme si j’aurais tombé sur ligne haute tension. Le jeu me rattrape, son immoralité me rattrape et la réalité me frappe. Mes larmes coulent. Où suis-je? De quel droit, m’oblige-t-on à vivre ceci? La vie dans les districts ce n’est pas toujours drôle, mais on serre les poings et on continue. Ici, c’est de la misère sur toute la ligne. On en mange pour déjeuner, pour dîner et pour souper. Je dois en sortir et vite.

Je l’impression de passer des heures à chercher ces deux choses. Je me dois de rester calme et posé, même si c’est difficile. Je me raccroche à la seule choses de bien de ma journée. S’il n’y en a pas trois, il y en a au moins une. J’ai survécu. Je me répète cette phrase dans ma tête. Je me retrouve dans les bras de Morphée et elle je la dit encore. Au diable le point faible de Deux, et le gars du un. Là, tout de suite, je suis toujours en vie.